Par Me Geoffroy Cruysmas, Avocat au barreau de Bruxelles, Membre du Cabinet du Bâtonnier de l’Ordre français des avocats du barreau de Bruxelles
Faut-il s’en réjouir ou s’en lamenter ? L’Internet est aujourd’hui au cœur de notre activité professionnelle.
Le courrier électronique est, pour beaucoup, devenu une plaie, au point que d’aucuns revendiquent travailler certains jours non à bureau fermé mais à ordinateur éteint. La déontologie impose à tout avocat de disposer d’une « adresse électronique individuelle » (article 4.10 du Code de déontologie) qu’il est tenu de communiquer à son Ordre (article 4.10.a du Règlement déontologique bruxellois), lequel la publie dans des annuaires en ligne.
Tout cabinet, quelle qu’en soit la taille, semble aujourd’hui n’exister que s’il est présent sur la toile. Les sites Internet rivalisent de commune originalité, entre vues du palais de justice, balances à l’équilibre parfois précaire et photographies – ou non – des avocats qui y travaillent. Les matières pratiquées par ceux-ci sont parfois qualifiées de spécialisation (titre protégé par les articles 4.63 et suivants du Code de déontologie). Et il arrive que l’on y trouve une rubrique « Articles de presse » ou « Jurisprudence », parfois source de difficultés sur lesquelles le conseil de l’Ordre a déjà eu l’occasion de se pencher (Recueil 2019, p. 484, n° 625).
Est-il besoin de rappeler qu’un site Internet est considéré comme le « prolongement » du cabinet de l’avocat (article 4.11 du Code de déontologie) et que les informations qu’il contient doivent être respectueuses de nos règles déontologiques, en particulier le secret professionnel et les dispositions relatives à la publicité (articles 5.3 et suivants du Code de déontologie) ?
Quant aux LegalTechs, intermédiaires de mise en relations (professionnelles, bien évidemment), annuaires électroniques, sites de consultations, réseaux sociaux, les articles 4.12 et 4.13 du Code de déontologie donnent de précieuses indications à ceux qui souhaitent y participer :
Bien entendu, l’avocat est lui-même tenu de s’identifier auprès de son client mais aussi de lui communiquer les informations que requièrent la loi (en particulier le Code de droit économique) et la déontologie (notamment à propos du mode de calcul de ses frais et honoraires, articles 5.18 et 5.19 du Code de déontologie).
Les avis qu’il délivre le sont sous sa signature et sa responsabilité, dans le respect du secret professionnel qui est le sien.
Et si l’opérateur qui exploite le site au travers duquel intervient la mise en relation ou la consultation entend être rémunéré, cela ne peut se faire au travers d’une rétrocession d’honoraires, expressément prohibée par l’article 4.12, § 3, 5° du Code de déontologie : tout au plus l’avocat peut-il participer aux « frais de gestion » de cet opérateur, à la condition que cela « ne soit pas [lié] à la nature de l’intervention de l’avocat ».
Toutefois, il peut être utile de se souvenir que les devoirs essentiels énumérés par l’article 1.2 du Code de déontologie dont, bien évidemment, le secret professionnel mais aussi la dignité, la délicatesse et la confraternité, s’appliquent à l’avocat tant dans le cadre de l’exercice de sa profession qu’en dehors celle-ci, dans sa vie quotidienne.
Sans doutes certaines de ces règles sont-elles appelées à évoluer. Elles ne peuvent constituer un frein au développement de l’activité des avocats, pour autant qu’il s’opère dans le respect de nos valeurs essentielles.
En définitive, ce sont celles-ci qui demeurent le meilleur guide pour l’exercice de notre profession, dans les nuages comme sur la terre ferme.
[supsystic-social-sharing id="1"]